Dispositifs médicaux : définir ses revendications, une étape stratégique

En mai 2021, le règlement européen sur les dispositifs médicaux (RDM) a remplacé l’ancienne directive de 1993. La mise à jour de cette dernière en 2007 avait déjà permis une adaptation aux évolutions technologiques en intégrant de façon explicite le logiciel en tant que dispositif médical (DM) à part entière. Mais le nouveau règlement, qui s’impose désormais de façon uniforme dans toute l’Union européenne, va beaucoup plus loin dans la qualification des DM et la protection des utilisateurs.

En effet, si la directive historique apparaissait de plus en plus en décalage avec la réalité des technologies déployées, l’élaboration du RDM s’est également faite en écho à plusieurs scandales sanitaires : Mediator®, prothèses PIP, implant files… Afin que de telles crises sanitaires ne se reproduisent pas, il est alors apparu essentiel de renforcer les règles et d’apporter des précisions pour éviter, notamment, qu’un produit ne puisse être détourné de son usage.

Ainsi, l’un des premiers articles du règlement insiste pour que le fabricant présente son produit pour ce qu’il est. Il revient particulièrement sur les notions clés de destination et d’allégations : le fabricant se doit de revendiquer la ou les finalités de son produit. Ce sont ces finalités qui vont conditionner, in fine, la catégorisation comme dispositif médical ou non.

Des nombreuses étapes qui composent la démarche du marquage CE, depuis la mise en place d’un système qualité jusqu’aux études cliniques, la description des finalités est l’une des plus stratégiques. Dans certains cas, la qualification d’un produit semble aller de soi : un appareil d’hémodialyse qui a pour finalité le remplacement d’un processus physiologique, ou bien un système d’électrocardiographie permettant le diagnostic d’une maladie.

Dans d’autres cas en revanche, selon la revendication voulue par le fabricant, la définition des finalités du produit peut induire ou non le classement en dispositif médical. Ainsi, une application permettant de mesurer la fréquence cardiaque pourrait ne pas être un dispositif médical si sa finalité est de mesurer uniquement des performances sportives. C’est notamment le cas pour des appareils ou applications qui se trouvent à la frontière du « bien-être » et du médical. C’est à ce moment que ces choix se posent comme stratégiques.

Quand la possibilité se présente, décider de s’engager dans la démarche de certification en tant que dispositif médical est une voie des plus exigeantes en termes de temps, d’argent et d’investissement nécessaire. C’est aussi la seule façon de le présenter commercialement comme ayant des finalités d’ordre médical. C’est enfin s’assurer d’une libre commercialisation dans tous les pays européens, puisque le RDM est d’application uniforme dans toute l’Union européenne : si le produit est conforme dans un pays, il le sera dans tous les autres.

Choisir au contraire de ne pas aller sur le terrain du dispositif médical, c’est la perspective d’une mise sur le marché plus rapide et de contraintes allégées. Mais c’est aussi se priver de l’image rassurante du marquage CE, de certaines filières de distribution (en particulier hospitalière) et d’une démarche qualité approfondie. Pas d’inquiétude cependant : il est toujours possible de faire évoluer les revendications ultérieurement et de s’engager dans la voie de certification du DM avec une nouvelle version du produit !

Le nouveau RDM a été conçu au bénéfice des utilisateurs comme des fabricants, donnant à ces derniers les moyens pour créer des dispositifs à la fois sûrs et efficaces. Sûrs, car ils ne doivent pas pouvoir aggraver un état de santé ou créer de nouveaux dommages. Efficaces, car ils doivent atteindre les performances revendiquées par le fabricant.

L’étape de revendication des finalités est donc partie intégrante d’une véritable stratégie règlementaire qui aura des répercutions durables sur le produit, sur le fabricant, sur son image auprès des consommateurs, sur le bien-être et la satisfaction de ces derniers.


Clément Marrel
Consultant dispositifs médicaux

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