La télésurveillance médicale entre dans le droit commun : quelles conséquences ?

Le Journal Officiel du 24 décembre 2021 a consacré la télésurveillance dans le droit commun. Nous revenons ici sur le parcours de cette loi, depuis les expérimentations du programme ETAPES jusqu’à ses conséquences sur les professionnels de santé, les patients et les industriels.

Lancé en 2014, le programme ETAPES (Expérimentations de Télémédecine pour l’Amélioration des Parcours en Santé) ne concernait initialement que la téléconsultation et la téléexpertise. Il avait été ouvert à la télésurveillance médicale de manière assez progressive pour les patients atteints de maladies chroniques : insuffisance cardiaque, rénale ou respiratoire, diabète, porteurs de prothèses cardiaques implantables. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 avait prorogé le programme ETAPES pour la télésurveillance médicale pour une durée de 4 ans.

Pourquoi cette décision ? Le législateur avait en effet estimé que la télésurveillance médicale était un acte de télémédecine plus complexe du fait de l’intervention de trois acteurs dans la prise en charge du patient : le médecin qui assure la télésurveillance médicale, le professionnel de santé (infirmier, médecin…) qui réalise l’accompagnement thérapeutique permettant  au patient d’être acteur de son parcours, et enfin le prestataire qui fournit la solution technique (objet connecté, application  mobile, etc.) et assure son bon fonctionnement. Selon le Ministère des Solidarités et de la  Santé, c’est la complexité de cette relation tripartite qui a nécessité un temps d’expérimentation plus long.

Les pouvoirs publics ont considéré que la télésurveillance médicale devait être prise en charge par l’Assurance maladie, comme cela avait été le cas précédemment pour la téléconsultation et la téléexpertise. Cette entrée dans le droit commun, actée par l’article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, entraîne différentes conséquences pour les médecins, les industriels et les patients, comme nous allons le voir ci-après.

Selon l’article L. 162-48-I du code de la sécurité sociale, constituent des activités de télésurveillance médicale les interventions associant d’une part une surveillance médicale ayant pour objet l’analyse des données et des alertes transmises au moyen de dispositifs médicaux numériques, et d’autre part des dispositifs médicaux numériques ayant pour fonction de collecter, d’analyser et de transmettre des données physiologiques, cliniques ou psychologiques.

Dans cette définition, la solution technologique utilisée pour faire de la télésurveillance médicale est un dispositif médical au sens de l’article 2 du Règlement européen sur les dispositifs médicaux (RDM). Les professionnels de santé utilisateurs de ces solutions seront donc amenés à se former à l’utilisation de ces dispositifs.

Pour les industriels qui proposent ce type de dispositifs ou les start-up qui en ont le projet, la conséquence est qu’elles devront obligatoirement s’inscrire dans le processus d’un marquage CE de leur dispositif.

Par ailleurs, il existe de nombreuses conditions pour ouvrir droit au remboursement par l’Assurance maladie. En ce sens, l’activité de télésurveillance médicale est obligatoirement effectuée par un médecin, qui prend le nom d’opérateur de télésurveillance médicale. Ce dernier doit obligatoirement déclarer son activité auprès de l’ARS pour ouvrir droit au remboursement.

Le programme ETAPES fait l’objet d’un régime transitoire pour les expérimentations encore en œuvre, il est probable que certaines questions seront encore abordées d’ici décembre 2022. D’ici là, professionnels de santé et industriels vont pouvoir se mettre en ordre de marche pour se conformer aux nouvelles dispositions.


Pauline Nicolas
Consultante juridique en droit de la santé

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